Interview d’Ofer Bronchtein, Président du Forum International pour la Paix par Céline Lussato
« Avec l’appui des Américains ou sans, les Palestiniens se présenteront à l’Onu pour demander une reconnaissance de leur Etat », affirme le président du Forum international pour la paix.
Qu’attendez-vous du discours d’Obama sur la question conflit israélo-palestinien ?
– Ce que j’attends c’est une position concrète, précise, détaillée. Dire qu’il est pour un Etat palestinien, que cela va être sur les frontières de 1967 ou dire que les colonies sont un obstacle à la paix, on le sait, rien de nouveau!
Ce qu’il faut maintenant c’est être déterminé, clair et précis. Obama doit nous dire comment il voit les négociations entre Israéliens et Palestiniens, reprendre sur ces bases là et dire quand ces négociations doivent commencer et se terminer selon un agenda clair.
Un Etat palestinien doit être créé sur les bases qu’on connait tous : la même quantité de territoires conquise par Israël en 1967 ce qi veut dire des échanges de territoires certainement, Jérusalem-Est capitale de l’Etat palestinien, Jérusalem-Ouest capitale d’Israël, le 1,5 km² de la ville sainte gérée par la communauté internationale, une solution équitable et négociée sur la question des réfugiés, un Etat palestinien démilitarisé et afin de garantir la sécurité d’Israël pourquoi ne pas envisager l’entrée de celle-ce dans l’Otan, accepter la proposition française d’une force internationale à la frontière jordano-palestinienne et une reconnaissance d’Israël par tous ses voisins.
Si les Etats-Unis ne veulent pas être discrédités dans les changements radicaux qui se déroulent au Moyen-Orient, ils sont obligés d’être clairs, fermes et précis. C’est ce que j’attends du président Obama demain.
C’est ce que vous attendez, mais est-ce ce que vous pensez qu’il dira ?
– Je pense qu’il va dire une partie de ce que j’attends. Il va répéter son engagement à la création d’un Etat palestinien, son engagement à la sécurité d’Israël, que cet Etat palestinien doit être sur les frontières de 1967, que Jérusalem doit être la capitale des deux Etats, mais je crains qu’il ne nous dise pas quand et comment on va y arriver et j’aimerais justement qu’il nous le dise de la façon la plus précise. Sinon, avec l’appui des Américains ou sans, les Palestiniens se présenteront à la prochaine assemblée générale des Nations Unies au mois de septembre à New York pour demander une reconnaissance de leur Etat, ce qui mettrait les Etats-Unis en porte a faux. Je pense qu’Obama va tout faire pour éviter cette éventualité et c’est pour cela qu’il doit être déterminé.
Nicolas Sarkozy proposait il y a quelques semaines de transformer la réunion prévue au mois de juin à Paris en conférence de reprise des négociations. Barack Obama va-t-il aller dans ce sens ?
– Depuis les accords d’Oslo de 1993, Paris a été la capitale des volets économiques du processus de paix. C’est à Paris que les pays donateurs se rencontrent depuis presque 20 ans. La conférence du mois de juin était prévue, et Sarkozy a souhaité donner une dimension politique à cette conférence.
Pour l’instant son plus grand obstacle, c’est son grand ami –et je le dis cyniquement- Benyamin Netanyahu. J’espère que le printemps arabe qui souffle sur cette région amènera les pays de la communauté internationale à accepter de se réunir à Paris en juin pour donner un encouragement politique à la création d’un Etat palestinien. Et j’espère qu’Obama acceptera la proposition de Nicolas Sarkozy.
Benyamin Netanyahu est attendu à Washington le 20, Obama s’exprimera également devant le lobby juif américain Aipac dimanche. Est-il judicieux qu’Obama s’exprime avant ces deux rendez-vous ?
– Les agendas ont été planifiés ainsi depuis de longs mois. Il est bon que le président Obama dise à quoi il pense et ce qu’il veut. Nous sommes à un moment où les Américains veulent rester un acteur majeur au Proche-Orient mais aussi au moment où ils ont réussi à éliminer Ben Laden et ont ainsi fragilisé leur position face au monde arabo-musulman. Obama va devoir montrer que ce qu’il a dit au Caire il y a trois ans, il le pense sincèrement. Et il est bon qu’il le dise avant de rencontrer Netanyahu car cela met ce dernier dans l’obligation de répondre de façon claire et précise. Sinon Netanyahu sera balayé par le souffle des libertés qui est en train d’envahir le Proche-Orient et il sera oublié comme le seront Ben Ali, Moubarak, et les autres. C’est une décision de Netanyahu : veut-il rester un homme politique habile ou rentrer dans l’histoire comme un homme d’Etat qui a enfin apporter la paix aux Israéliens et aux Palestiniens ?
Obama est-il un partenaire des Palestiniens sur le chemin de la création d’un Etat ?
– Obama qui oblige les Israéliens à geler les colonies il y a trois ans, Obama qui dit qu’il est pour un Etat palestinien sur les bases de 1967, Obama qui fait son discours du Caire, j’espère ne sera pas un autre homme demain. Il doit donner la preuve qu’il est déterminé à avoir une position équilibrée au Proche-Orient et à régler le conflit une fois pour toute en donnant des garanties sur la sécurité d’Israël, en influençant les pays arabes à reconnaître Israël, par la création d’un Etat palestinien qui a tous les moyens de devenir un Etat démocratique et pacifique.